Ça, c’est Isabelle Corlier

Drôle d’oiseau, Isabelle Corlier. C’est une scribouillasse. Voici la définition qu’elle en donne sur son blog.

« Scribouillard (n.m.). Animal vertébré et bizarrement cortiqué, résident principalement en imaginaire. Obsédé compulsif de la page blanche. Féminin : Scribouillasse ».

Le ton est donné. J’ai croisé le chemin d’Isabelle dans une galaxie endimanchée et silencieuse de la blogosphère, Le Silent Sunday. Et un beau jour, j’apprends qu’elle a publié son premier roman, un polar, Ring Est, aux éditions Ker, lequel a reçu le Prix Fintro Écritures Noires 2017. Maniaque de la page blanche donc mais également de la page noire. La quatrième de couverture est plutôt séduisante. 

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Au commencement

Zut. Zut et zut. Fin 2017, il était au Théâtre du Rond-Point, à Paris. Je connais ce théâtre. Quelle pièce ai-je donc vue dans ce théâtre. Non. Ce n’est pas possible. Mais où donc avais-je la tête à la fin de l’année dernière. Fais quelque chose, bon sang. Pourquoi cette information m’a-t-elle échappé. POURQUOI. Peut-être devrais-je créer des alertes. « Jouissif et imperceptiblement drôle » d’après Libération. « Objet scénique non identifié » selon Le Monde.

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Ce matin, avant d’envoyer Sidonie dans ma Corbeille, j’ai repensé à ce que m’avait dit un ami il y a quelques mois à propos d’un autre billet : « Pourquoi as-tu supprimé ton dernier article ? Dès lors que tu publies un article, celui-ci ne t’appartient plus. Il appartient au lecteur. Tu n’as pas le droit de supprimer ainsi un article ! ».

Cette remarque surprenante mais pertinente soulève de nombreuses problématiques liées à la difficulté d’écrire, me semble-t-il : tout d’abord, à partir de quel moment considère-t-on qu’un texte est prêt à être publié ? (je ne m’intéresse pas ici à ceux qui font de la littérature leur « métier » (*), qui travaillent à une œuvre au long court mais de nous autres, blogueurs – quel vilain mot que j’emploie ici sans dédain – qui publient vaille que vaille des articles, billets et autres chroniques sur la Toile pour des raisons… diverses et variées – quant à moi, après huit mois de présence sur WordPress, je ne suis pas même certaine de savoir exactement pourquoi j’ai ouvert ce blog chronophage à souhait… Outre le plaisir de noircir du papier, la joie de la découverte, le partage de…). « Ne raconte pas ta vie. Concentre-toi sur ton sujet ».

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Echanges

« Dans les semaines qui ont suivi, la vie s’est organisée. Il y a eu des croisements. Marc Mazetti par exemple a vu un matin Béatrice Benoît dévaler les marches du perron et courir dans l’allée. Un instant il a cru qu’elle se précipitait vers lui. Il s’est figé. La peur qu’il soit arrivé quelque chose au vieil homme. Mais non. Elle était juste en retard, courait vers sa mobylette garée près de l’entrée. Elle est passée à côté de lui, a fait un signe de la main. Il se l’est rappelé après, plusieurs fois dans la journée. A chaque fois il en était heureux. C’était un geste amical. Il y avait donc entre eux une sorte de connivence, une familiarité. Oui, il en était heureux»

Ce matin-là, alors que je m’apprête à arroser mes géraniums, j’aperçois une tache qui s’agite sur le sol de mon balcon. J’ajuste mes lunettes. Pas de doute, il s’agit bien d’une punaise verte en mauvaise posture, ses trois paires de pattes en l’air. Je dépose mon arrosoir, cours chercher un morceau de papier et retourne sur les lieux du drame. Elle pédale toujours dans le vide, tourne sur elle-même. Allez, essaye de te redresser toute seule. Tu vas bien y arriver. Non, décidément, elle a besoin d’aide. Je connais l’issue de cette histoire, c’est peut-être pour cette raison que cette scène me fait sourire et qu’elle me rend joyeuse (Léonie aurait sans doute préféré une version plus nauséabonde de la fin mais elle n’a pas droit à la parole dans cet espace, n’est-ce-pas).

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La plume de Joséphine

Joséphine Lanesem

« Parce que la forme est contraignante, l’idée jaillit plus intense ! ». On pourrait appliquer ce mot de Baudelaire à l’exercice de style que s’impose et propose Joséphine Lanesem avec brio dans son recueil Je serai ta cage et ta forêt. A partir de cinq mots choisis par ses proches et amis, elle compose un récit pour chacun, « comme une histoire sur mesure », à la manière d’un musicien inspiré, échevelé.

La plume de Joséphine, c’est la « plume du joséphin, oiseau azuré des glaciers ». C’est la plume de l’oiseau de Paradis niché dans la transparence éclatante de L’Arbre du Paradis, incarné par le souffle des pinceaux de Séraphine de Senlis (quelle merveilleuse mise en bouche que la première de couverture !). C’est un don, un abandon qui a le bon goût de l’enfance, de l’étrangeté, de l’intériorité. Comme l’a souligné une grenouille amoureuse d’un hortensia (mais-pas-que), c’est surtout une déclaration d’amour à ses proches et amis – et aussi une offrande généreuse à ses lecteurs.

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La Pléiade

Lire me transporte.

Je me faisais une joie de passer ma soirée en compagnie de Nathalie Sarraute. Dans ma bibliothèque, mes livres sont plus ou moins classés par ordre alphabétique. Pourtant, à la lettre S et dans son voisinage le plus proche, après plusieurs vérifications, je dois me rendre à l’évidence : pas de Tropismes en édition de poche !

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Métaphore inattendue

En ce lundi de début avril, dans le train qui m’emmène à Paris-Saint-Lazare, une femme est assise non loin de moi, de dos. Bouclés, fournis et courts, ses cheveux noirs de couleur orangée tendant vers le rouge témoignent avec éclat du plus mauvais goût, du plus mauvais choix de sa perruque. Corpulente, elle porte une longue robe très colorée – avec une prévalence de jaune vif – aux motifs floraux africains. Elle tient son smartphone à la manière d’une tasse de thé, le petit doigt en l’air, tout près de son oreille gauche. Sa main droite serait-elle plongée dans un paquet de madeleines ? D’imposants bijoux dorés ornent ses doigts et ses poignets – peut-être même son cou. Peints en vert façon menthe fraîche, elle semble fière de ses ongles.

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