Préambule
L’Agenda ironique, ce mois-ci, est placé sous l’égide d’André (pas fait exprès), à travers un hommage rendu au poète Marcel Thiry. « Le thème sera le titre de son recueil de poésie, titre et premier vers de son premier poème paru en 1924 : “Toi qui pâlis au nom de Vancouver.”
Les mots imposés ont été tirés au hasard dans le même recueil : paradis, accordéoniste, suave, Alfa Romeo, février, accord et civil. »
Le corbeau de Vancouver. Madeleine et Léonie # 30
Agenda ironique, août 2018
LÉONIE. – [elle se racle la gorge]
Sur le trottoir indigo
un jeune soldat, sage,
dort dans les choux-fleurs
[fièrement] Et voilà le travail !
MADELEINE. – QUOI ?! Mais ce n’est pas du tout un poème fondu, ça ! Tu n’as pas respecté les règles ! Hop, exclue du cercle de l’OuLiPo (1) !
LÉONIE. – A bas les règles, les consignes et autres billevesées ! Dame Contrainte, allez vous faire voir à Vancouver. Vive le Grand N’importe quoi.
MADELEINE. – Convoquer Arthur (2) et Lucien (3) ! En plein hors-sujet, ma pauvre Lucette ! Je te rappelle que l’invité de ce mois-ci s’appelle Marcel Thiry, né le 13 mars 1897, à Charleroi et mort le…
LÉONIE. – Épargne-moi l’état civil de ce monsieur, veux-tu. Les belges, toujours les belges ! Il n’est question que des belges en ce moment ! Au secours ! Dans ma vie, il n’existe qu’un seul Marcel – le plus fringant, le plus vivant, le plus intelligent des êtres. Le plus…
MADELEINE. – On a compris. Voici un vrai poème fondu :
Dans un bar sans éclat
Une Allemande, un soldat
Il suffit d’un soir
LÉONIE. – [elle imite la voix de Madeleine] Et d’un matin suave et doux… afin d’accueillir, dans la lumière duveteuse de l’Enfer, les grands perroquets verts de l’accordéoniste fou.
MADELEINE. – [elle hausse les épaules] Tu ne l’emporteras pas au Paradis, crois-moi. Et tes enfants non plus.
LÉONIE. – Depuis quand ai-je des enfants ?
MADELEINE.- Depuis l’ère glacière et léonienne du grand N’importe Quoi. [blanc] Pour en revenir à Marcel Thiry, j’ai appris qu’on avait retrouvé dans ses archives un document exceptionnel.
LÉONIE. – Exceptionnel en quoi ?
MADELEINE. – Laisse-moi finir. Il s’agit d’une lettre un peu particulière. Celle d’un corbeau.
LÉONIE. – Un corbeau. Ben voyons. Un corbeau farci aux cèpes ?
MADELEINE. – Ses archives sont accessibles sur Internet. Regarde, j’ai fait une capture d’écran (4).
LÉONIE. – [impénétrable]
MADELEINE. – Tu ne remarques rien ?
LÉONIE. – Fake news. Point.
MADELEINE. – Point ? comme le titre et le thème du numéro 2 de la revue Artichaut ?
LÉONIE. Double fake news.
MADELEINE. – Zut, c’est le numéro 3, en effet.
LÉONIE. – La lettre n’est pas signée.
MADELEINE. – La lettre d’un corbeau n’est jamais signée, triple buse. Tu vois bien que cette lettre est incomplète. Des mots ont disparu. D’après les spécialistes, il existerait même une page 2. Certains, comme Corolle Lerourette, pensent que l’auteur de cette lettre n’est autre que…
LÉONIE. – Jacques Prévert, « Martyr, c’est pourrir un peu« .
MADELEINE. – [abattue et sidérée] Tu ne manques pas d’air ! Pourquoi casses-tu toujours mes effets de cette façon ?
LÉONIE. – [indifférente] Je ne respire que du gaz carbo-ironique.
MADELEINE. – A propos d’ironie, c’est quoi déjà la consigne de l’agenda de ce mois-ci ?
LÉONIE. – En accord avec André (hé hé), Andrea (ah ah) ne participera pas à l’Agenda (hi-han).
Toi qui pâlis au nom de Vancouver de Marcel Thiry (1924)
Le poème non fondu de Léonie
Toi qui pâlis au nom de Vancouver
Tu n’as pourtant fait qu’un banal voyage ;
Tu n’as pas vu les grands perroquets verts,
Les fleuves indigo ni les sauvages.
Tu t’embarquais à bord de maints steamers
Dont par malheur pas un ne fit naufrage,
Sans grand éclat tu servis sous Stürmer,
Pour déserter tu fus toujours trop sage.
Mais il suffit à ton orgueil chagrin
D’avoir été ce soldat pérégrin
Sur le trottoir des villes inconnues,
Et, seul, un soir, dans un bar de Broadway,
D’avoir aimé les grâces Greenaway
D’une Allemande aux mains savamment nues.
Le poème fondu de Madeleine
Toi qui pâlis au nom de Vancouver
Tu n’as pourtant fait qu’un banal voyage ;
Tu n’as pas vu les grands perroquets verts,
Les fleuves indigo ni les sauvages.
Tu t’embarquais à bord de maints steamers
Dont par malheur pas un ne fit naufrage,
Sans grand éclat tu servis sous Stürmer,
Pour déserter tu fus toujours trop sage.
Mais il suffit à ton orgueil chagrin
D’avoir été ce soldat pérégrin
Sur le trottoir des villes inconnues,
Et, seul, un soir, dans un bar de Broadway,
D’avoir aimé les grâces Greenaway
D’une Allemande aux mains savamment nues.
j’en reste coi !
excellentissime, un peu fondu, mais excellentissime !
J’aimeAimé par 2 personnes
Ah ah ! Merci Carnets !
Fondu ou fondant ?!
😉
J’aimeAimé par 1 personne
fondu, fondant, confondant, tout est dicible.
s’il faut préciser, je pourrais dire « perché » , comme le corbac de Vancouver 😉
J’aimeAimé par 2 personnes
Moi, je dirais « un peu fondu ET excellentissime », pas « mais »
J’aimeAimé par 1 personne
Oh, mais elle chipote, l’Écrevisse !
😉
J’aimeAimé par 1 personne
Ah mais non ! Le « mais » est trop restrictif, alors que le « et » est addictif… heu… additif, LOL
J’aimeAimé par 1 personne
La poésie est plus que Vancouverisée, ici ! C’est une grain-rigolade de choux-fleurs bien tournée, un bricolage de mots tricoté avec adresse.
Bravo, que d’idée pour ce corbeau ironique d’août chez André.
Admirative.
J’aimeAimé par 2 personnes
Merci pour votre lecture.
J’ai découvert votre partition avec beaucoup de plaisir. Madeleine et Léonie ont du souci à se faire : vous êtes une redoutable tricoteuse.
😉
J’aimeAimé par 2 personnes
Oh ! Mais que lige dit la stupréfète !
Pardon ?
Oh ! Mais que lis-je, dis-je, stupéfaite !
C’est de lard, comme disait Pierre Cochon dans sa chronique normande.
Pardon ?
C’est de l’art, du grand art OuLiPianiste !
J’aimeAimé par 2 personnes
Pardon ? Vous pouvez répéter ? Je suis un peu dure de la feuille !
😉
J’aimeJ’aime
Au fait, tu sais que c’est grâce à toi que l’inspiration est venue ?
En me lisant, tu as eu un déclic et en te lisant, j’ai eu une sorte d’illumination !
C’est magique !
😉
J’aimeAimé par 1 personne
Et lycée de Versailles 😀
J’aimeAimé par 1 personne
J’ai hâte de lire ta production !
J’aimeJ’aime
Va falloir que tu te couches tard, ce soir !!!
J’aimeAimé par 1 personne
Euh… tu peux pas avancer ta publication de quelques heures ?
J’aimeAimé par 1 personne
Banco… j’ai fini de bidouiller… Rendez-vous à 15 h 30 😉
J’aimeAimé par 1 personne
Un bar sans éclat, une allemande,
Un soldat…
Un soir.
J’aimeJ’aime
Tiens, une ancienne connaissance… bien écrémée !
J’aimeAimé par 1 personne
hum, hélas je ne suis pas le soldat….désolé je ne sais pas ce que j’ai.
J’aimeAimé par 1 personne
Bon jour,
Inattendu et maîtrisé de bout en bout. Bravo !
Max-Louis
J’aimeAimé par 1 personne
Bonjour et merci d’être passé, Max-Louis.
🙂
J’aimeAimé par 1 personne
Bravo (hoho). J’en reste bouche bée (héhé),quelle belle idée qu’André a eu là (haha) et comme tu as bien pondu 😉
J’aimeAimé par 1 personne
Hé hé, merci Patch Patch !
🙂
J’aimeJ’aime